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Nobel de littérature 2025: vers un retour à une plume occidentale?
Nobel de littérature 2025: vers un retour à une plume occidentale? / Photo: Jonathan NACKSTRAND - AFP

Nobel de littérature 2025: vers un retour à une plume occidentale?

Après avoir couronné en 2024 la Sud-Coréenne Han Kang, première femme asiatique à recevoir le Nobel de littérature, l'Académie suédoise pourrait opter jeudi pour un auteur occidental, comme ceux qui ont longtemps dominé son histoire centenaire, mais les bookmakers parient eux sur un auteur indien.

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Plusieurs critiques littéraires sondés par l'AFP tablent cette année sur un homme européen ou du monde anglo-saxon. Les plus en vue sont l'Australien Gerald Murnane, le Roumain Mircea Cartarescu, les Hongrois Laszlo Krasznahorkai et Peter Nadas, ainsi que le Suisse Christian Kracht.

L'Académie suédoise l'assure: elle ne se concentre que sur la qualité littéraire des œuvres qui lui sont soumises.

Mais bien que ses membres "ne disent pas explicitement penser en terme de représentation (de genre, de pays, ndlr), on peut quand même regarder la liste et voir qu'il y a un peu de ça", souligne Lina Kalmteg, journaliste culture à la radio publique suédoise SR.

Ainsi, depuis 2017, près d'un lauréat sur deux est une femme, fait-elle remarquer.

- "Homme blanc"? -

Björn Wiman, rédacteur en chef culturel du quotidien Dagens Nyheter, abonde. Après Han Kang, "c'est au tour d'un homme blanc issu de la sphère linguistique anglo-saxonne, allemande ou francophone" d'être récompensé. Lui adorerait voir Christian Kracht remporter le prix.

Le dernier roman de l'écrivain de 58 ans, "Air" (non traduit en français), oscille entre réel et fantastique, mêlant critique du consumérisme et quête existentielle.

Au salon du livre à Göteborg, qui se déroule quelques semaines avant la saison des Nobel, "l'Académie suédoise était là, assise au premier rang" du colloque de cet auteur, relève-t-il dans un entretien à l'AFP.

"Et ça, en général, c'est un signe qui ne trompe pas", poursuit M. Wiman. La même chose s'était produite lorsque la dramaturge autrichienne Elfriede Jelinek avait décroché le prix en 2004.

- Rêve -

L'autre favori, Gerald Murnane, né en 1939 dans une banlieue de Melbourne d'un père porté sur les courses de chevaux, a grandi dans un foyer catholique.

Son livre "Les Plaines" (1982), qui plonge le lecteur dans le monde des propriétaires terriens australiens, a été décrit par le New Yorker comme un "chef d'oeuvre bizarre", ressemblant plus à un rêve qu'à un livre.

"La question est de savoir s'il répondra au téléphone, je ne sais même pas s'il en a un", s'amuse Josefin de Gregorio, critique littéraire au journal SvD.

"Il n'a jamais quitté l'Australie. Il vit à la campagne, il ne se rend pas particulièrement accessible", ajoute celle dont c'est l'auteur préféré. La critique mise aussi sur l'Américain George Saunders.

L'Indien Amitav Ghosh a caracolé en tête des sites de pari ces derniers jours et d'autres noms régulièrement mis en avant sont de nouveau considérés comme "nobélisables": l'Américano-antiguaise Jamaica Kincaid, le Chilien Raúl Zurita, l'Argentin César Aira.

L'Amérique du sud n'a d'ailleurs pas eu de lauréat depuis 2010 avec le sacre du Péruvien Mario Vargas Llosa, note Mme Kalmteg. Elle cite les écrivaines mexicaines Fernanda Melchor et Cristina Rivera Garza comme potentielles gagnantes.

Depuis sa création, le Nobel de littérature est dominé par les hommes et les lettres occidentales. Parmi les 121 lauréats, seules 18 femmes ont obtenu le prix et une minorité des auteurs récompensés sont de langues asiatiques ou moyen-orientales. Aucune langue africaine n'est représentée.

Difficile de connaître les ressorts des sélections: les délibérations du jury sont gardées secrètes pendant 50 ans.

- Rééquilibrage -

Faute de mieux, la composition de l'Académie suédoise, qui décerne le prix après avoir passé en revue les propositions d'un collège de lettrés et d'universitaires grâce à son comité Nobel, est passée au crible.

Bouleversée par un scandale #Metoo en 2018, elle a fait peau neuve et plus de la moitié de ses membres ont changé.

Depuis, un rééquilibrage entre les femmes et les hommes primés est en cours.

"Des auteurs comme Han Kang auraient été tout à fait impensables il y a cinq ou six ans", analyse le rédacteur en chef culturel de DN qui note que le cénacle a longtemps privilégié des auteurs pointus, et plus âgés.

Reflet d'une "nouvelle" Académie moins "élitiste" dans ses goûts?

Tout n'est, à ce stade, que spéculations.

Le suspense sera levé à Stockholm à 13H00 (11H00 GMT), avec, à la clef, 11 millions de couronnes suédoises (près d'un million d'euros).

G.Goel--MT