

Harvard: une juge va bloquer la décision de Trump sur les étudiants étrangers
En pleine bataille judiciaire avec le gouvernement de Donald Trump, Harvard a remis jeudi ses diplômes avec une bonne nouvelle à la clé: la suspension, annoncée par une juge, de l'interdiction d'accueillir des étudiants étrangers.
Traditionnellement marquée par des discours émouvants d'étudiants portant toge et toque à Cambridge, dans l'agglomération de Boston (nord-est), la cérémonie survient au moment où le président américain exerce une pression sans précédent sur la plus ancienne université des Etats-Unis.
Donald Trump veut lui interdire d'accueillir des étudiants étrangers, a supprimé ses contrats avec le gouvernement fédéral, réduit ses subventions de plusieurs milliards de dollars et remis en cause son statut d'établissement exonéré d'impôts.
Le président de Harvard Alan Garber a soulevé une tempête d'applaudissements en mentionnant dans son discours jeudi la présence à la cérémonie des étudiants étrangers avec leurs familles "comme il se doit", sans évoquer directement la bataille judiciaire avec l'administration Trump.
En parallèle, une juge fédérale de Boston, Allison Burroughs, qui avait déjà octroyé un sursis de quelques jours à Harvard sur l'accueil des étudiants étrangers, tenait une audience sur la prorogation de cette mesure.
La juge a indiqué lors de cette audience qu'elle allait bien bloquer, pour une période encore non précisée, la mesure de l'administration Trump qui avait semé la consternation chez les étudiants et dans les milieux de l'enseignement supérieur aux Etats-Unis.
Les étudiants et chercheurs étrangers de Harvard sont "nombreux à faire état d'une détresse émotionnelle importante qui affecte leur santé mentale et rend difficile la concentration sur leurs études", a déploré mercredi Maureen Martin, la directrice des services d'immigration de l'université.
"Un nombre incalculable d'étudiants étrangers se sont renseignés sur la possibilité d'un transfert vers une autre institution", a ajouté Mme Martin, dans des documents judiciaires.
- "Représailles" -
L'institution de l'Ivy League, le club fermé des grandes universités américaines, s'est attiré les foudres de Donald Trump en prenant la tête de la résistance à sa volonté de contrôler les recrutements, le contenu des programmes ou encore les orientations des universités dans le domaine de la recherche.
Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, le président s'est lancé dans une vaste campagne contre des universités qu'il accuse de propager une idéologie "woke".
Il leur reproche notamment leurs politiques de promotion de la diversité ou encore d'avoir laissé proliférer des manifestations contre la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza, qu'il assimile à de "l'antisémitisme".
"Harvard manque beaucoup de respect à notre pays et ne fait que s'enfoncer de plus en plus", a déclaré Donald Trump mercredi. La ministre de la Sécurité intérieure, Kristi Noem, a renchéri jeudi en qualifiant le refus de Harvard de se plier aux mesures du gouvernement de "dédain à l'égard du peuple américain".
A contrario, l'université Columbia a fait des concessions importantes à l'administration, espérant récupérer les 400 millions de dollars de subventions fédérales qui lui avaient été retirées.
Ancienne juge spécialisée dans l'immigration, Patricia Sheppard a manifesté mercredi devant Harvard, vêtue d'une robe noire de magistrate et brandissant une pancarte: "Pour l'Etat de droit".
"Il n'est pas normal qu'un président s'engage dans certaines actions à titre de représailles", a-t-elle dit à l'AFP.
"Parfois, ils n'aiment pas ce que nous représentons", avait pour sa part estimé mardi Alan Garber sur la radio NPR, en référence à l'administration Trump, bien décidée à promouvoir son idéologie conservatrice.
Il a reconnu des problèmes d'antisémitisme à Harvard. Mais "ce qui laisse perplexe, c'est que les mesures qu'ils ont prises pour résoudre ces problèmes ne touchent même pas les personnes qui en sont selon eux à l'origine", avait affirmé le président de l'université.
La star du basket-ball et militant des droits humains Kareem Abdul-Jabbar s'est adressé à la promotion 2025 à l'occasion de la journée des étudiants mercredi, comparant le combat d'Alan Garber à celui de Rosa Parks, icône de la lutte pour les droits civiques contre la ségrégation raciale.
I.Khatri--MT