

La Géorgie aux urnes pour des élections locales, l'opposition appelle à manifester
Les Géorgiens sont appelés aux urnes samedi pour des élections locales dont l'opposition entend se saisir pour mobiliser la population dans la rue, au risque de se heurter à une nouvelle vague de répression et d'arrestations.
Le Premier ministre Irakli Kobakhidzé a promis une réponse policière sévère en cas de débordements dans le pays, et de mettre en échec les visées "révolutionnaires" de ceux qui appellent à manifester.
Ces élections locales sont boycottées par plusieurs partis d'opposition, dont le Mouvement national uni (MNU) de l'ex-président Mikheïl Saakachvili, qui a lui-même appelé ses partisans à descendre dans la rue.
Mais pour le parti au pouvoir, Rêve géorgien, contrôlé par le milliardaire Bidzina Ivanishvili, le vote fait figure de premier test électoral depuis la crise politique déclenchée par les législatives d'octobre 2024 qu'il a remportées.
Ces élections, aux résultats jugés truqués, avaient été suivies par des mois d'une contestation durement réprimée.
Dirigeants de l'opposition, journalistes ou simples militants: une soixantaine de personnes ont été arrêtées depuis un an, selon les ONG de défense des droits humains.
Aux yeux de ces ONG et d'une bonne partie de l'opposition, l'enjeu samedi dépasse donc de loin celui d'un simple renouvellement d'élus locaux.
- "Désespoir total" -
Certains comme Mikheïl Saakachvili y voient "une dernière chance" pour sauver la démocratie dans ce pays du Caucase coincé entre la Turquie et la Russie, dont le pouvoir est accusé de s'être rapproché de Moscou avec une série de législations répressives.
"Descendons dans les rues le 4 octobre et tenons bon jusqu'au bout. La liberté c'est maintenant ou jamais!", a lancé M. Saakachvili jeudi dans une publication sur Facebook.
Faute d'une démonstration de force face au pouvoir, "le désespoir total s'installera et l'Occident finira par nous abandonner", a affirmé l'ancien président de 57 ans, emprisonné depuis 2021.
Symbole d'une société civile mobilisée, le chanteur d'opéra Paata Burchuladzé a convoqué "une assemblée nationale" citoyenne devant le Parlement à Tbilissi à la mi-journée (12H00 GMT).
Il a présenté cette action comme une manière pour la population de reprendre le pouvoir au Rêve géorgien, de manière pacifique.
"Bien sûr, la +révolution+ annoncée par Paata Burchuladzé échouera", a déclaré en écho le Premier ministre, en menaçant les participants de se retrouver "derrière les barreaux".
Il est difficile de prédire l'ampleur de la mobilisation citoyenne, et dans les rues de la capitale, les avis sont partagés sur la pertinence de ces appels aux rassemblements.
"Rêve géorgien détruit notre démocratie et notre avenir européen. Ils doivent partir", dit à l'AFP Levan Baramidzé, un architecte de 31 ans.
Mais Guliko Archvadzé semble bien plus résignée: "Cela fait des mois qu'on descend dans la rue par dizaines de milliers et rien n'a changé", lâche cette institutrice de 50 ans, qui juge la situation du pays "désespérée".
- Opposition divisée -
"Un autre grand rassemblement ne fera pas échouer le Rêve géorgien", poursuit-elle.
Au pouvoir depuis 2012, Rêve Géorgien s'est d'abord présenté comme une alternative libérale à Mikheïl Saakachvili, leader réformiste pro-européen qui a dirigé le pays pendant presque dix ans à partir de 2004 et s'est un temps exilé en Ukraine après sa chute.
Mais depuis l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie en 2022, le parti est accusé d'avoir œuvré à un rapprochement avec Moscou, avec notamment des mesures anti-LGBT et une loi sur les "agents étrangers" qu'a aussi fustigée l'Union européenne. Le processus d'adhésion de la Géorgie à l'UE a été suspendu.
Le Rêve Géorgien rejette ces accusations et assure promouvoir la "stabilité" dans le pays.
Un récent sondage de l'Institut d'études et d'analyse sociales estime la cote de popularité du parti à environ 36%, l'opposition ayant les faveurs de 54% des Géorgiens.
Mais cette opposition se divise. Si le parti de M. Saakachvili boycotte les élections locales en appelant à manifester, d'autres formations comme Lelo ou For Georgia soutiennent des candidats.
D.Kumar--MT