Madras Times - Face à la carpe asiatique, le Canada et les Etats-Unis résistent aux divisions politiques

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Face à la carpe asiatique, le Canada et les Etats-Unis résistent aux divisions politiques
Face à la carpe asiatique, le Canada et les Etats-Unis résistent aux divisions politiques / Photo: Jorge Uzon - AFP

Face à la carpe asiatique, le Canada et les Etats-Unis résistent aux divisions politiques

Dans la région des Grands Lacs, à cheval entre le Canada et les Etats-Unis, une cause unit le président Donald Trump, ses opposants démocrates et les Canadiens qu'il menace d'annexer: la lutte contre la carpe asiatique, espèce invasive, qui menace l'équilibre écologique de cette immense réserve d'eau douce.

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Introduite aux États-Unis dans les années 1970 pour contrôler les algues dans les étangs d'aquaculture, la carpe asiatique a progressivement migré vers le nord, probablement lors d'inondations.

Depuis, elle n'a cessé de se propager et de dévorer tout sur son passage.

"Ce sont de véritables machines à tout dévorer", explique Trisiah Tugade, biologiste aquatique au sein du programme canadien dédié à cette carpe envahissante.

À bord d'un bateau embarqué sur la rivière Grand, affluent du lac Érié, elle traque avec son équipe ces poissons capables de ravager les écosystèmes.

Sa progression via la rivière Illinois suscite des inquiétudes: si elle atteignait les Grands Lacs, ce serait un cauchemar écologique pour le plus grand système d'eau douce au monde.

"Rien ne fait plus peur aux défenseurs de l'environnement que l'idée de voir ces carpes établir une population reproductrice dans les Grands Lacs", estime Mike Shriberg, spécialiste de la politique de l'eau à l'Université du Michigan.

Alors, des équipes canadiennes inspectent les affluents des Grands Lacs, ciblant les zones propices à la reproduction: eaux chaudes, peu profondes, riches en végétation.

Sur la rivière Grand, Trisiah Tugade et son collègue biologiste Alex Price dirigent une opération de pêche électrique. Des perches immergées diffusent des impulsions sans danger qui étourdissent les poissons pour faciliter leur capture.

Les spécimens sont ensuite identifiés, mesurés, et relâchés s'ils ne sont pas jugés envahissants.

Depuis le lancement du programme en 2012, seules quelques dizaines de carpes ont été capturées dans les eaux canadiennes.

- Centaines de milliers d'œufs -

James Hall, pêcheur professionnel sur le lac Érié, se souvient avoir été l'un des premiers à en attraper une: "Je me demandais ce que c'était. Je savais que c'était un poisson inhabituel", raconte-t-il. Il l'a conservée sur glace et a alerté les autorités via la ligne dédiée.

Depuis la vigilance reste de mise. "Ces poissons peuvent se reproduire plusieurs fois par an et pondre des centaines de milliers d'œufs", souligne Alex Price.

Dès leur première année, ils deviennent trop gros pour les prédateurs naturels.

La menace est telle que cette lutte contre les carpes asiatiques continue à recevoir un soutien bipartisan, notamment dans des Etats américains clés comme le Michigan, l'Ohio ou la Pennsylvanie.

Pour Mike Shriberg, les Grands Lacs sont un "facteur d'unité" entre les partis américains mais aussi entre les deux pays.

Une note de la Maison Blanche signée par Trump en mai, réaffirmant son engagement contre "la menace économique et écologique des carpes envahissantes", a été saluée par tous.

"Dans un climat politique extrêmement polarisé, ce soutien discret montre le rôle unique des Grands Lacs dans la politique américaine", estime le chercheur.

Les tensions commerciales et les menaces d'annexion ont fragilisé les relations bilatérales entre les deux voisins nord-américains. Et plus tôt cette année, Donald Trump aurait même déclaré à l'ancien Premier ministre Justin Trudeau qu'il souhaitait réviser les traités régissant les Grands Lacs.

Dans ce contexte, l'avenir est incertain et "l'hostilité de l'administration Trump envers le Canada pourrait tout compromettre", ajoute Mike Shriberg.

Pourtant si la carpe envahissante venait à s'installer durablement, les conséquences seraient graves et imprévisibles.

"Cela bouleverserait l'équilibre écologique, prévient-il. Une fois dans les lacs… je ne crois pas qu'il serait possible de les éradiquer."

N.Mukherjee--MT